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le Mercredi 3 mars 2004 0:00 Le 3 mars 2004

« Une entreprise n’est pas plus polluante parce qu’elle est plus grosse » ? Pierre Bercier

« Une entreprise n’est pas plus polluante parce qu’elle est plus grosse » ? Pierre Bercier
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Pierre Bercier, président de l’Union des cultivateurs franco-ontariens. Photo C.Quirion.

L’Union des cultivateurs franco-ontariens appuie l’implantation de nouvelles porcheries dans l’Est ontarien. Se faisant, elle accorde la même importance à l’essor des secteurs de l’agrotourisme et de l’agroalimentaire. « Tous ont leur place, précise le président Pierre Bercier. Il s’agit de les circonscrire de façon à ce que la cohabitation s’établisse en harmonie ».

Suite aux débats entourant l’implantation de soi-disant ? mégaporcheries ? dans l’Est ontarien, l’Union des cultivateurs franco-ontariens (UCFO) se prononce: « Notre mission est de développer tous les secteurs de la production agricole. Il n’est pas question de retirer notre appui à une production sous prétexte que ses exploitations ne sont plus à dimension humaine. Qu’est-ce que la dimension humaine si ce n’est que de faire vivre une jeune famille d’agriculteur? », se demande Pierre Bercier, président de l’UCFO.

« Tous les secteurs évoluent dans ce sens, faudra t-il s’en prendre aux fermes laitières qui ont plus de 100 têtes’ Et que dire des poulaillers de 50 000 poules », s’interroge-t-il’

« Comme président, je dormirais bien mal si on me disait qu’il faut arrêter de soutenir les grosses productions, poursuit Pierre Bercier. Bien sûr, je préférerais que les fermes demeurent les plus petites possibles ».

M. Bercier croit que l’agriculture joue un rôle important dans la ruralité. « L’agriculture est le moteur économique de nos régions rurales et il nous faut des fermes prospères pour contrer l’exode rural. Notre mandat comporte une responsabilité sociale et communautaire qui s’exerce dans la sauvegarde de la profession agricole, ce à quoi nous nous appliquons. Je n’aime pas voir les villages perdrent leur école ».

L’Union des cultivateurs, qui fête incidemment son 75ième anniversaire cette année, oeuvre au développement des régions et encourage toutes les initiatives qui y contribuent. Avec la mise sur pied du Réseau des jeunes entrepreneurs en agroalimentaire, l’Union témoigne de son souci d’explorer toutes les avenues qui présentent des opportunités pour le maintien de la qualité de vie en milieu rural. De même, l’agrotourisme constitue à ses yeux, une richesse inestimable pour la région.

Selon lui, il n’y a aucun empêchement à ce que les entreprises agricoles de petites tailles et les plus grosses, évoluent dans la même région. « Il n’y a aucune raison, pour que l’agriculture et l’agrotourisme ne puissent cohabiter en harmonie, soutient Pierre Bercier. Il s’agit d’être vigilant et logique dans l’aménagement du territoire. »

À cette fin, l’UCFO et la Fédération de l’agriculture de l’Ontario ont constitué un comité consultatif qui conseillera les élus des Comtés unis dans les prises de décisions en matière de politiques agricoles et d’aménagement du territoire en milieu rural.

Pour le président, c’est une question de gros bon sens. Par exemple, l’on ne conseillera pas la construction d’une porcherie à quelques pas du perron de l’église ou d’une table champêtre. Selon le bon sens, un permis de restauration ne devrait pas être émis pour un établissement situé à quelques pieds d’un poulailler et l’on doit donner préséance à celui qui est installé en premier.

Débat sur les ? mégaporcheries ?

« Au Québec, le moratoire [sur le développement de la production porcine] s’appuie sur des données scientifiques. Ici, les moratoires sont fondés sur la peur », constate le président Pierre Bercier. Il faut dissocier la situation de l’Est de l’Ontario qui n’a rien de commun avec certaines MRC québécoises qui présentent des bilans de phosphores largement excédentaires. « Ici, nous pouvons utiliser plus de fumier puisque nos exploitations ne suffisent pas à combler ce besoin à cause du nombre décroissant de vaches laitières, renchérit-il. Avec la Loi 81, je suis confiant que nous ne nous retrouverons pas un jour, dans une situation comparable à certaines régions du Québec ».

À l’heure où les gouvernements encouragent les pratiques d’agriculture durable, il serait peut-être bon de se rappeler que le fumier est un engrais à 100% naturel. Ce n’est pas le fumier ni son odeur, qui causent des dommages à l’environnement mais bien une mauvaise gestion de ce dernier.

L’Ontario, avec sa Loi sur la gestion des éléments nutritifs, la Loi 81, contrôle l’ensemble des aspects liés à l’usage du fumier. La quantité, le type de sol qui le recevra, les distances de recul des cours d’eau, les périodes d’épandage ainsi que les installations destinées à l’entreposage y figurent. Avec les balises fixées par cette loi, l’Ontario empêche d’épandre au-delà des capacités de rétention du sol.

Dorénavant, les nouvelles exploitations agricoles et les exploitations existantes qui veulent prendre de l’expansion (jusqu’à un certain nombre d’unités nutritives) sont tenues de produire un plan de gestion des éléments nutritifs et de s’y conformer. Les entreprises de plus petite taille y seront soumises graduellement jusqu’en 2008.

Avec son étalon de mesure, l’unité nutritive, la Loi 81 ramène à une même échelle, toutes les productions animales. L’unité nutritive est établie en fonction des composantes du fumier, principalement sa teneur en azote et en phosphore ainsi que sur la quantité attribuable à une production. Ainsi, dépendamment du nombre d’unités nutritives, on détermine le nombre d’hectares que doit avoir à sa disposition, un producteur pour l’épandage de son fumier.

La composition du sol et sa teneur en éléments nutritifs interviennent aussi dans ce calcul. Avec la rigueur de la Loi 81 et ses règlements, il est injustifié de taxer de polluante, une entreprise à cause de sa taille.

D’ailleurs, le président de l’Union des cultivateurs s’inquiète de plus en plus de ce que l’information véhiculée sur l’agriculture ne soit pas toujours en relation avec la réalité. Il faut considérer que les pratiques agricoles ont évolué au rythme des études d’impact et au fil de l’évolution des entreprises.