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le Mercredi 16 septembre 2009 0:00 Volume 27 Numéro 03 Le 16 septembre 2009

Honoré Bourdeau ? Récipiendaire du Mérite agricole franco-ontarien 2009

Honoré Bourdeau ? Récipiendaire du Mérite agricole franco-ontarien 2009
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Fusain de M. Honoré Bourdeau qui est affiché en la Salle du mérite agricole du Campus d’Alfred. Le dessin a été réalisé par Johanne St-Laurent, de Clarence Creek, Ont.

On raconte que notre récipiendaire aimait faire régulièrement le tour de ses terres accompagné de son épouse Rose pour contempler les vastes champs d’avoine et de maïs, résultat de leur travail. Tirant sur une gerbe d’avoine, ils admiraient, tous deux, la beauté des grains dorés roulant dans le creux de leurs mains.

Honoré Bourdeau avait l’agriculture dans le sang comme son père et son grand-père d’ailleurs qui ont cultivé les riches sols du Rang Ste-Marie à Embrun pendant au-delà de cent ans.

Né le 28 février 1914 sur la ferme familiale, c’est en 1936 à l’âge de 22 ans qu’il prend la relève de la ferme de son grand-père, Ovila Bourdeau. Son père Émile avait acheté la ferme de son beau-père à Crysler, dans l’Est de l’Ontario.

Lorsqu’il s’y installe, la terre de 75 arpents est déjà payée puisque le jeune Honoré y avait investi ses salaires d’enseignant à l’école de rang.

Mais les débuts furent difficiles car il fallait trouver des ressources supplémentaires’ pour acheter des vaches de race, pour construire des bâtiments et des silos’ pour acheter plus de terrain’ pour acheter de la machinerie et pour drainer les sols.

Honoré et Rose relèvent avec brio tous les défis. Doué d’une constitution physique vigoureuse et d’un sens des affaires, il règle les problèmes au jour le jour. De plus, la vie familiale est bien remplie. Le couple Bourdeau a mis au monde et élevé, dans le sens noble du terme, quatre filles et trois garçons.

Lorsque le fils cadet Denis prend la relève de la ferme en 1978, c’est tout un domaine qu’il acquiert : une entreprise agricole productive et bien gérée qui s’inscrit dans la classe élite de l’agriculture en terre ontarienne.

Mais les hauts faits d’Honoré Bourdeau en agriculture ne se limitent pas au développement de son entreprise. Pour bien comprendre l’oeuvre d’Honoré Bourdeau, il faut expliquer que notre récipiendaire était un homme « instruit » pour son temps. Après avoir obtenu son diplôme de huitième année à l’école du village, il s’inscrit à l’école Modèle d’Embrun où il obtient un diplôme équivalent à une dixième année.

Par la suite, il décroche un certificat d’enseignement à l’élémentaire. À l’âge de 17 ans, il décroche son premier emploi d’enseignant à une école élémentaire à St-Albert. Par la suite, il ira enseigner quelques années dans la région de Sudbury.

C’est là d’ailleurs qu’il rencontrera Rose Henri, sa compagne de vie pendant cinquante-trois ans.

Lorsqu’il revient dans son patelin natal à Embrun en 1936, sa réputation de jeune homme instruit, honnête et généreux de sa personne le précédait déjà et jusqu’à la fin de ses jours, il fut sollicité de toute part par toute une kyrielle d’organismes bénévoles.

Il s’implique d’abord dans le secteur agricole. Dès son retour, dans l’Est ontarien, il accepte un poste de secrétaire à la Fromagerie coopérative de St-Albert. Puis il devient un membre fondateur de la Coopérative agricole d’Embrun et siège à son conseil d’administration pendant six ans. De 1960 à 1970, il devient président des Producteurs de porc et pendant la même période de temps, il est président de la Fédération d’agriculture du comté de Russell.

Il fut le représentant de l’assurance-récolte de l’Ontario de 1967 à 1984 et membre du comité de révision des prêts agricoles pour l’Est ontarien.

Toute sa vie active, il fut aussi un membre assidu de l’Association pour l’amélioration des sols et récoltes du comté de Russell. Cette association lui a décerné en 1985, l’Ordre du Mérite agricole, une reconnaissance qu’elle décerne annuellement. De 1956 à 1982, il est courtier d’assurance pour la compagnie Co-operators, une mutuelle d’assurance qui est au service des agriculteurs.

Il fut aussi pendant 15 ans, représentant pour la compagnie Prescott Mutuelle Assurance, une autre coopérative qui servait le monde agricole.

Tour à tour, il s’implique aussi en politique municipale à titre de conseiller et de sous-préfet. Sa formation d’enseignant l’amène aussi à oeuvrer dans le milieu des conseils scolaires pendant plusieurs années.

Il se dévoue aussi, toute sa vie, dans des oeuvres paroissiales et communautaires, comme membre du conseil paroissial et comme président du Centre récréatif d’Embrun pendant neuf ans. Le Conseil des chevaliers de Colomb, le Club Richelieu, le Club d’âge d’Or ont tous aussi eu droit à sa générosité.

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omme de foi et d’accueil, il a un profond attachement pour son Église et les oeuvres de son temps tels que la Ligue du Sacré-C’ur, la Société St-Jean-Baptiste, etc. Il s’implique aussi dans l’administration des choses temporelles de sa paroisse. Il exprime sa foi par l’accueil et la générosité. Nombreux sont ceux qui ont trouvé gîte et couvert dans sa maison pour des séjours de plusieurs mois à plusieurs années.

Mais Honoré Bourdeau était aussi un fervent adepte d’une deuxième religion: la coopération. Tout au long de sa vie il a cru fortement que les institutions coopératives pouvaient être un levier important de développement socio-économique en milieu franco-ontarien. Homme d’action plutôt que de discours, il prêcha la coopération par l’exemple.

En 1945, au lendemain de la deuxième guerre mondiale, il fut l’une d’un groupe de 25 personnes qui a fondé la caisse populaire d’Embrun en y achetant une part sociale de cinq dollars chacun, payable à raison de 10 cents par semaine. Il devient le président fondateur. Il occupa le poste de président pendant 34 ans et fut administrateur pendant trente six ans soit de 1964 à 1983.

De plus, il occupa de 1964 à 1982 un poste d’administrateur au Chapitre des caisses populaires St-Laurent Outaouais.

Comme nous l’avons mentionné plus tôt, il a aussi prêté main forte à la Fromagerie coopérative St-Albert et fut un des membres fondateur de la Coopérative agricole d’Embrun et a oeuvré au sein de deux mutuelles d’assurances. En 1985, il fut reçu à l’Ordre du Mérite coopératif ontarien au plus haut échelon de cet ordre.

C’est le 20 mars 2000 que s’est éteint ce pionnier franco-ontarien tout à fait hors du commun. Il laisse dans son sillon un héritage riche et fécond: une progéniture qui a repris le flambeau du leadership communautaire, une entreprise agricole modèle habilement géré par une cinquième génération et un mouvement coopératif fort qui est le moteur de la vie communautaire et associative de sa communauté d’aujourd’hui et le souvenir d’un homme qui a profondément aimé la terre et son prochain.

C’est pour toutes ces raisons que l’Union des cultivateurs franco-ontariens et l’Université de Guelph, Campus d’Alfred unissent aujourd’hui leur voix pour décerner aujourd’hui à titre posthume à M. Honoré Bourdeau, l’Ordre du Mérite agricole franco-ontarien.