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le Mercredi 2 novembre 2011 0:00 Volume 29 Numéro 06 Le 2 novembre 2011

Élever la race pour la protéger

Élever la race pour la protéger
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La technologie et les nouvelles connaissances acquises depuis quelques décennies ont permis à l’agriculture de changer de visage. Les races d’animaux qu’élevaient nos ancêtres et les plantes que cultivaient les premiers colons arrivés en Amérique tendent à disparaître. La vache Holstein d’aujourd’hui, par exemple, a tellement évolué grâce aux croisements et à la sélection génétique qu’on pourrait difficilement la comparer à ses ascendants. Tout cela pour une soi-disant productivité.

Jeannine Langlois et Michel Bourdeau de la Ferme Excalibur n’adhèrent pas à cette mentalité. Leur priorité : préserver les races domestiques menacées.

Chaque jour, des voitures s’arrêtent en bordure de leurs champs situés à Embrun, dans l’Est ontarien. Ce n’est pas pour admirer des chevreuils qui broutent la luzerne fraîche, mais bien pour contempler leur troupeau de bœufs de boucherie : des Highland.

Avec leurs cornes de la longueur d’un bras d’humain, des poils longs et leur forme imposante (2 000lb pour un mâle et 1 100lb pour une femelle), les animaux du couple Langlois-Bourdeau ne passent pas inaperçus.

La race Highland est connue particulièrement grâce à son poil long. Généralement de couleur rouge, ses poils ondulants ont la particularité d’avoir deux épaisseurs. Les poils situés plus à l’intérieur sont doux et fins et forment un petit duvet. Quant à l’extérieur, ils atteignent en moyenne 13 pouces de long et sont imperméables.

Brefs, les bœufs de cette race n’ont jamais trop chaud, ni trop froid. En été, quelques poils tombent et en hiver, leur cuir épais et leur première couche de duvet leur permettent de s’adapter à nos climats rigoureux.

« On a fait notre devoir de recherche. On voulait un animal qui ait toutes les qualités nécessaires pour survivre à l’extérieur, même en hiver », affirme Madame Langlois.

Alimentation

Une autre caractéristique qui fait de l’Highland une race appréciable pour ses propriétaires est sans contredit sa forte capacité à brouter et à s’adapter à des pâturages pauvres. Les coûts d’alimentation sont donc moins élevés puisque l’animal a cette facilité de convertir les aliments moins riches en éléments nutritifs.

En plus du pâturage, Michel Bourdeau nourrit les bovins avec 3 à 5 balles rondes de foin sec par jour et va couper quotidiennement une tonne d’herbes fraîches, à l’exception de l’hiver… pour l’instant ! Bientôt ses bœufs auront accès à de la nourriture fraîchement coupée, même en saison hivernale.

L’agriculteur s’est inspiré d’un concept déjà existant pour concevoir une serre hydroponique de dimension 30 x 72 pieds dans laquelle il fera pousser des fourrages de qualité pour son troupeau. Chauffée aux copeaux de bois, la serre sera conçue pour accueillir plusieurs étages de plateaux dans lesquels poussera un mélange de blé et d’orge.

Ayant une croissance moyenne de deux pouces par jour, la culture sera alimentée en eau à valeur ajoutée. Grâce à un mélange d’algues salées de Nouvelle-Écosse et d’eau, les pousses seront salées et contiendront de nombreux éléments essentiels à la croissance des vaches.

En somme, le couple espère obtenir une croissance plus rapide de leurs bovins. « Nous visons un poids vif de 800lbs à l’abatage et la serre, espérons-le, va nous aider à accélérer ce gain de poids. Donc l’animal aura atteint ce poids à 18 mois plutôt qu’à 24 mois », souligne l’éleveuse.

Michel et Jeannine prennent plaisir à élever leurs animaux à l’extérieur à longueur d’année. Famille d’accueil de longue date, tous les gens qui habitent sous leur toit participent aux activités agricoles. Pas question de laisser quelqu’un de côté, tous doivent y mettre du sien. Si bien que les animaux font partie intégrante de la famille, et pour cause. Une femelle peut produire des veaux jusqu’à dix-huit ans et avant d’être saillie pour la première fois, il faut attendre quatre ans.

Il faut donc être patient, très patient. C’est d’ailleurs ce qui fait en sorte que la viande de la vache Highland est très demandée. La liste d’attente de Jeannine Langlois est longue. « La dernière fois que j’avais un quartier de disponible parce qu’un client s’était décommandé à la dernière minute, ça n’a pris que cinq heures avant de trouver preneur », raconte Jeannine. Et elle n’a pas non plus l’intention de vendre des sujets de reproduction puisqu’elle désire garder toutes ses bêtes afin d’arriver un jour à subvenir à la demande.

Selon l’organisme Rare Breeds Canada, la vache de race Highland est classée dans la catégorie des animaux vulnérables. Il n’existe qu’entre 76 et 250 animaux pur-sang enregistrés à travers le pays.