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le Mercredi 5 septembre 2012 0:00 Volume 30 Numéro 02 Le 7 septembre 2012

La science au service des agriculteurs

La science au service des agriculteurs
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Marc Laflèche et son frère Christian, tous deux agriculteurs de St-Albert, ont été peu affectés par la sécheresse de cet été. Leurs champs de maïs, de soya et de foin sont tellement en bonne condition qu’ils font presque des jaloux. Ils prévoient même récolter de 3 à 5 % plus de grains que les années précédentes. Tout cela grâce à un projet d’étude réalisé, entre autres, à même leurs terres agricoles.

À première vue, nul ne pourrait dire pourquoi les plants de maïs des Laflèche semblent en aussi bonne condition, alors qu’à quelques kilomètres seulement de leur ferme, d’autres champs ont subi les conséquences du manque de précipitation prolongé et de la chaleur accablante. Enfin, personne à l’exception des scientifiques qui mènent actuellement une étude sur l’évaluation des pratiques de gestion bénéfiques à la ferme.

Leurs champs, situés en majeure partie aux abords du drain municipal de Blanchard, sont le terrain d’une étude menée par Agriculture et Agroalimentaire Canada et Canards Illimités Canada, en partenariat avec l’organisme Conservation de la Nation Sud (CNS).

Le projet qui consistait à installer des structures de drainage contrôlé connectées aux tuyaux de drainage souterrain des terres agricoles afin d’en diminuer l’écoulement des eaux libres à fortes concentrations en azote provenant du sol.

Au total, environ 90 structures de contrôle ont été installées dans les champs à proximité des drains municipaux de Blanchard et de Bisaillon, dans l’Est ontarien. Ces deux micro-bassins, d’environ 300 à 400 hectares chacun, servent depuis 8 ans à évaluer l’efficacité des pratiques de gestion bénéfique (structures de contrôle) afin de voir si celles-ci atténuent l’écoulement et l’accumulation d’éléments polluants dans les cours d’eau.

Fonctionnement
Il est prouvé que le drainage par tuyaux favorise l’écoulement accéléré de plusieurs éléments nutritifs du sol, particulièrement l’azote, dans les ruisseaux.

Toutefois, en raccordant les tuyaux de drainage collectés aux drains municipaux à des structures de contrôle, on bloque, en temps opportun, l’écoulement des eaux «contaminées».

Au printemps, l’eau peut circuler librement grâce aux tuyaux de drainage, alors que plus tard dans la saison, des plaquettes de métal peuvent être installées dans la structure pour empêcher l’eau de s’écouler jusqu’à un certain niveau désiré.

Effets bénéfiques multiples
On accuse souvent, les agriculteurs de contaminer les cours d’eau avoisinant leur ferme et d’être responsable de la piètre qualité de l’eau de ceux-ci. Or, cette recherche pourrait permettre aux agriculteurs de mieux contrôler l’écoulement des eaux, et ainsi réduire leur empreinte environnementale, tout en maximisant le rendement de leurs cultures.

Lors des saisons plus sèches, comme cette année, les bénéfices du drainage par canalisations contrôlé ne tardent pas à se faire ressentir. Mark Sunohara qui travaille sur le projet pour Agriculture et Agroalimentaire Canada explique que les 90 champs dans lesquels sont installées les structures ont bénéficié de deux semaines de grâce cet été. L’eau accumulée dans les drains est demeurée emprisonnée pendant environ 14 jours, la rendant disponible aux plantes assoiffées.

De fait, l’installation des plaquettes de métal permet de retenir l’eau dans les tuyaux de drainage et de maintenir l’humidité du sol. Cela permet aussi d’emmagasiner l’eau riche en nutriments dans le sol afin de la rendre plus accessible aux plantes en période de croissance.

Selon Ronda Boutz, coordonnatrice de la qualité de l’eau pour la CNS, les bénéfiques pourraient même être d’ordre économique avec la réduction des besoins du sol en fertilisants. «C’est ce que nous tentons de démontrer à l’heure actuelle et de prouver aux agriculteurs. […] S’ils voient des effets positifs, c’est plus vendeur. »

De plus, une surveillance accrue en amont et en aval des ruisseaux a permis de constater une diminution significative du taux d’azote dans le ruisseau, soit de près de 30 %.

Financement
Conservation de la Nation Sud bénéficie actuellement de subventions pour l’installation de telles structures de contrôle du drainage. Selon Mme Boutz, l’investissement de 800 $ ne prend que 3 à 5 ans avant d’être rentabilisé.

« Nous avons environ 40 structures à offrir aux agriculteurs de notre territoire. Nous prenons en charge les frais d’installation jusqu’à concurrence de 400 $ ». Avis aux intéressés !