le Vendredi 29 mars 2024
le Mercredi 30 mars 2016 12:48 Volume 33 numéro 14 Le 25 mars 2016

Le Mérite agricole pour feu Léon Delorme

Le Mérite agricole pour feu Léon Delorme
00:00 00:00

C ’est avec reconnaissance que l’Union des cultivateurs franco-ontariens rendra un hommage posthume à M. Léon Delorme en lui décer­nant le Mérite agricole fran­co-ontarien 2016, le 8 avril prochain.

Je partage avec vous ici, l’oeuvre d’un homme qui avait une vision humani­taire en voulant nourrir le monde.

M. Léon Delorme (1920 — 2012) est né à Wendover le 6 septembre 1920, d’une famille de huit enfants. Après des études primaires à l’école de rang du village, notre récipien­daire se dirige vers le Petit Séminaire d’Ottawa pour éventuellement obtenir un baccalauréat ès arts en 1943. L’attrait pour la profes­sion agronomique le mène ensuite à l’Institut agricole d’Oka pour en ressortir quatre ans plus tard avec un baccalauréat en science agricole, BSA, de l’Univer­sité de Montréal.

Comme étudiant, il a tra­vaillé pendant deux étés avec l’agronome M. Ferdi­nand Larose, au Départe­ment de l’Agriculture de l’Ontario à Plantagenet. Puis, après l’obtention de son diplôme en 1947, il a été embauché comme assistant agronome et vulgarisateur pour les comtés de Prescott- Russell, toujours à Plantage­net.

Sans doute ce travail avec M. Larose lui fut bénéfique pour reconnaître l’impor­tance de la gestion des sols dans nos milieux. Cette préoccupation devint son tremplin vers des accom­plissements locaux et inter­nationaux. Toutefois, le but de M. Delorme n’était pas de planter des arbres comme l’agronome-envi­ronnementaliste qu’était M. Larose mais plutôt de nour­rir le monde avec les mêmes sols.

Des débuts modestes

Sa vraie carrière d’agri­culteur débute en 1953 avec l’achat de sa première ferme, son «hobby farm», comme il le disait. Cette terre dans la région de Curran se trouvait de l’autre côté d’une planta­tion de la fôret Larose, fruit du travail de son premier patron, amorcé environ 25 ans auparavant. Pour le jeune agronome devenu agriculteur, ce n’est pas tout de suite l’euphorie avec ses 10 acres de pommes de terre pratiquement sans équipe­ments et une jeune famille qui s’agrandit.

Sur le plan familial, M. Delorme s’est marié à Yvette Montreuil de l’Ancienne Lorette, le 2 octobre 1950. Le couple s’établit à Plan­tagenet. De cette union, cinq enfants sont nés entre 1952 et 1961, soit Daniel, Louis, Marie-France, Line et Lorraine. Ils ont sans doute tous contribué au succès de l’entreprise, Léon Delorme ltée, en aidant au besoin.

En mode expansion

De 1953 à 1981, notre réci­piendaire s’impose comme producteur de pommes de terre et fait l’acquisition de plusieurs fermes voisines. Se basant sur ses connais­sances agronomiques, il voit ces terres plus ou moins fertiles se transfor­mer en une ferme pros­père. Cela se produit grâce au drainage souterrain, à l’adaptation des méthodes de culture en tenant compte de la variété ensemencée, à de meilleures connaissances sur les différents types de sol et aussi avec à l’arrivée de techniques modernes de production.

Un entrepreneur né

Avec l’achat de fermes additionnelles, le chaî­non faible de l’entreprise devient vite le manque d’équipements spécialisés pour continuer à faire pro­gresser l’affaire. Afin de remédier à cette lacune, en 1963, M. Delorme débute comme distributeur d’équi­pements pour les cultures de pommes de terre et d’oi­gnons pour l’Est ontarien et le Québec. Sans le savoir, il est intégrateur, dans le vrai sens du mot pour la production de pommes de terre. Comme vendeur de la Cie Lockwood Corporation, il parcourt plusieurs fois la province voisine ainsi que l’Est ontarien en plus de gérer et faire les travaux à la ferme en même temps. En bon gestionnaire, il devient un excellent distributeur et vendeur pour la compa­gnie. En 1967, 1968 et 1969, il reçoit la décoration du meil­leur vendeur en Amérique du Nord pour la Compa­gnie Lockwood Corpora­tion – French Connection.

Infatigable

En 1980, sa passion d’en­trepreneur fait de nouveau surface. Il fait l’acquisition de l’Imprimerie de Plan­tagenet. Cet achat repré­sente une autre facette de la capacité d’administra­teur et de gestionnaire de M. Delorme. Aujourd’hui, l’imprimerie est la propriété de Louis Delorme, son deu­xième fils.

Un nouveau rêve

Après la vente de la ferme à Daniel, son fils aîné, en 1981, M. Delorme aurait pu se reposer, relaxer et jouer au golf comme beaucoup de personnes de son âge. Mais non, il met plutôt le cap sur le Cameroun en Afrique. La fondation de la Guadeloupe lui a deman­dé d’aller analyser les sols pour améliorer les possibi­lités de cultures.

À son retour, il décide de s’engager personnellement afin d’aider le peuple afri­cain. Le voilà à 82 ans qui se lance dans un nouveau rêve. Il partage ses idées avec des collègues et il s’entoure de bénévoles en vue de trouver les fonds nécessaires pour la construction d’un collège d’agriculture, lequel serait doté d’un département des arts, de métiers et de com­merce en plus d’une caisse populaire. Avec l’aide de M. Gaston Gaudreau, homme d’affaires de Bourget, la fon­dation Vision Léon Delorme Internationale voit le jour. Avec le support financier de l’Agence canadienne de développement internatio­nal (ACDI), un montant de 100,000 $, incluant un mon­tant de 26,000 $ récolté loca­lement, fut envoyé la pre­mière année pour ce projet. Les fonds amassés viennent de différentes activités dont principalement des tournois de golf. Sur une période de trois ans, de l’aide financière sera envoyée au Cameroun et au Honduras.

Engagé socialement

Je me dois de prendre quelques instants pour mentionner quelques acti­vités sociales, municipales et scolaires de M.Delorme. Il s’implique dans plusieurs milieux dont : membre et président du comité de pla­nification de la régie des terrains pour les comtés de Prescott-Russell, président du conseil d’éducation des comtés de Prescott-Russell, président fondateur de la corporation des logis à prix modiques de Plantagenet, président de la section ma­joritaire de langue française du conseil d’éducation, pré­sident fondateur du centre récréatif de Plantagenet et combien d’autres mouve­ments, comités et organi­sations. Il me semble que les jours avaient plus que 24 heures pour M.Delorme.

Pour conclure, j’aimerais mentionner que la ferme Léon Delorme ltée qui ap­partient maintenant à Ni­cholas Henrard , demeure encore aujourd’hui l’une des plus grosses entreprises de pommes de terre en On­tario.

Je vous laisse avec cette réflexion que l’on retrouve au verso de la carte mor­tuaire de M.Delorme, dé­cédé le 30 mai 2012 et qui le décrit très bien : « Il est de ces gens qui laissent des traces — Au-delà du temps — Au-delà du vent qui passe — Il est de ces hommes qui de leurs mains ont enfoui dans la terre un roseau qui fleurira — Même après qu’il partira — Car plus fort que l’hiver… Il survivra… »