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le Mercredi 15 mai 2019 13:19 Volume 36 Numéro 12 - Le 26 Avril 2019

Mur végétal biofiltre pour décontaminer l’air d’un bâtiment

Mur végétal biofiltre pour décontaminer l’air d’un bâtiment
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 Il est connu depuis plusieurs années que l’air que nous respirons à l’intérieur des bâtiments est de piètre qualité, soit 5 à 7 fois plus polluée que l’extérieur. Les polluants proviennent de différents matériaux ou objets qui s’évaporent tels que la colle, la peinture, les plastiques, les tapis, les produits cosmétiques et les vernis. Étant donné que nous passons au moins 80 % de notre temps dans cet environnement, il n’est pas surprenant de constater que cet air est responsable de plusieurs problèmes de santé (maux de tête, fatigue, allergies).

 Présentement la principale recommandation pour assainir l’air vicié est d’éviter les matériaux polluants, d’entretenir les systèmes de ventilation et de ventiler. Ce dernier procédé est cependant coûteux parce qu’il faut réchauffer l’air en hiver ou rafraîchir l’air en été. Or l’installation d’un mur végétal biofiltre peut décontaminer l’air tout en réduisant les coûts d’énergie.

Construction

 Les murs végétaux biofiltres tels que ceux construits par la compagnie Nedlaw Living Wall pour dépolluer l’air sont composés essentiellement d’un panneau d’aluminium troué qui supporte deux feuilles de feutre. Le feutre sert de substrat. Un ventilateur est installé à l’arrière du panneau troué pour aspirer l’air au travers des feutres. L’air est par la suite projeté au-dessus de l’installation ou dans le système de ventilation du bâtiment. Il est possible de construire des systèmes sans ventilateur, mais ils sont beaucoup moins performants pour décontaminer l’air. Un substrat tourbeux, de la fibre de noix de coco et de la laine de roche sont souvent recommandés pour ce type de mur végétal.

 Le système d’irrigation comprend une ligne de goutteurs au-dessus des feutres avec un bac et une pompe à la base du panneau pour faire circuler la solution nutritive. Les murs végétalisés biofiltres sont gérés comme un système hydroponique avec comme options différents capteurs et des systèmes informatiques pour régler la solution nutritive (pH, salinité, niveau de l’eau).

 Selon l’entreprise Nedlaw Living Walls une installation de base coûte environ $220/pi2 à $250/pi2 selon la surface du système et il faut environ un pied carré de surface de biofiltre pour 100 pieds carrés de surface de plancher pour atteindre les objectifs de filtration. La durée du système dépasse les 15 ans.

Bénéfices

 Le principal rôle d’un mur végétal biofiltre est la décontamination de l’air. Contrairement à un mythe, ce n’est pas la partie aérienne qui est responsable de la dégradation des polluants, mais l’activité des microorganismes sur les racines et dans le substrat. Les feuilles produisent les sucres qui servent à nourrir les microbes d’où l’importance de plantes en santé. Il est mentionné qu’un seul passage de l’air dans les feutres réduit de 50 % les polluants chimiques de l’air. Un avantage indéniable des biofiltres est qu’ils sont autonettoyants contrairement aux filtres des systèmes de ventilation.  

De plus, ces installations réduisent la poussière et le dioxyde de carbone et élèvent la concentration d’oxygène. Combinés à l’effet esthétique des plantes, tous ces facteurs contribuent à réduire l’absentéisme au travail.

Un autre bénéfice est que le recyclage de l’air intérieur permet de réduire les apports extérieurs ce qui abaisse les coûts de chauffage et de climatisation. Des calculs à partir de modèles informatiques indiquent que si l’air est complètement recyclé, la facture énergétique est diminuée de 5 à 6 fois en utilisant un biofiltre.  Les murs végétalisés sont donc tout indiqués pour les programmes LEED.

Les murs végétaux peuvent laisser place à la création et l’imagination. Ici, un mur végétal sans ventilateur est décoré pour Noël et le temps des fêtes. Photo Charles de Maisonneuve.

Plantes et entretien

 Généralement se sont des plantes vertes qui sont choisies tels que Ficus benjamina, Hedera helix, Draecaena sp., Schefflera arboricola, Ficus elastica et Philodendron selloum. Les critères de sélection des plantes sont basés sur celles qui produisent microbes racinaires de dégradation de polluants, qui poussent sur des systèmes hydroponiques verticaux et qui sont décoratives.

 La plantation se fait avec des spécimens matures dont on a enlevé le substrat autour des racines. Le procédé consiste à faire une fente dans le feutre externe et à y insérer les racines entre les deux feutres qui ont été bien humectés. L’entretien des plantes ne diffère pas des techniques habituelles et se fait une fois par mois.

  La fertilisation est effectuée avec des engrais utilisés en hydroponie. La salinité est maintenue à 1,5mS/cm2. Puisque la transpiration est élevée, le niveau d’eau tend à baisser et la conductivité électrique tend à augmenter. Il faut alors ajouter de l’eau fréquemment.

 D’autre part l’efficacité du biofiltre dépend d’un bon taux de croissance.  L’intensité lumineuse naturelle est souvent trop faible pour atteindre ce niveau pour les plantes vertes mentionnées ci-dessus. Il faut donc l’augmenter à environ 1000 pieds-chandelles en installant des lampes à haute pression au sodium (HPS) ou à diodes électroluminescentes (DEL).

Conclusion

 Les murs végétalisés biofiltres ont fait leur preuve. Bien qu’ils soient encore peu utilisés, ils ont  un avenir prometteur parce que les populations urbaines sont de plus en plus conscientisées de l’importance de la qualité de l’air. De plus, l’Université de Guelph et la NASA font des recherches pour mettre au point un mur végétal biofiltre qui serait utilisé pour de longs voyages dans l’espace. Il ne faudrait pas se surprendre éventuellement de lire une demande d’emploi dans l’Agricom avec le titre suivant «Horticulteur ou horticultrice demandé(e) pour un voyage vers Mars» !