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le Jeudi 2 mai 2019 19:11 Volume 36 Numéro 12 - Le 26 Avril 2019

L’aquaponie dans nos assiettes!

L’aquaponie dans nos assiettes!
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L’aquaponie se définit comme la culture de poissons et de plantes dans un milieu fermé. Ce système de culture réunit l’aquaculture et l’hydroponie, mais est beaucoup plus écologique et naturel. Les poissons contribuent à la croissance des plantes et les plantes purifient l’eau pour les poissons. 

C’est en janvier 2017 que Frédérick Miner démarre le projet de Miner Aqua Green Foods (MAG Foods) dans son garage. À l’époque tout est nouveau; autant pour lui, sa conjointe Guylaine et sa fille Kassandra qui l’accompagne dans ce projet. Ainsi de 2017 à 2018, ils procèdent ensemble à des analyses. Le climat du Canada est un obstacle majeur à cause des systèmes qui sont requis pour le chauffage l’hiver et la ventilation nécessaires lors d’extrêmes températures en été. «Au début il fallait mettre de côté le coût de notre main-d’œuvre et ne pas compter nos heures, seulement le coût des produits était pris en compte» explique M. Miner.

La jeune entreprise MAG Foods qui opère déjà avec succès est un modèle qui attire de plus en plus plusieurs clients et curieux.  Les installations situées à Curran dans l’Est ontarien sont une des premières de ce genre dans la région. Tout est fait de manière à suivre les normes biologiques pour l’agriculture. Les éléments choisis comme le terreau de démarrage de mousse de tourbe ou le paillis utilisé sont aussi certifiés biologiques. Même les installations sont faites le plus possible à partir de matériaux réutilisés et récupérés.

Ici on peut voir la salade romaine dans toute sa splendeur bientôt prête pour les clients. Photo : Roxanne Lormand

Un avantage de l’aquaponie c’est que la culture est intérieure et en milieu fermé «…  dans un circuit fermé comme le nôtre, nous pouvons mieux contrôler l’environnement externe comme les vents les conditions météorologiques» explique Kassandra. «On n’a aucune crainte que les récoltes puissent être influencées, rajoute Frédérick. Il faut simplement surveiller l’ensemble et surtout les poissons.» Les poissons mangent et produisent des excréments qui sont récoltés et captés. Ensuite grâce à de bonnes bactéries créées naturellement par le poisson, les bactéries dégradent les derniers composés solubles qui  deviennent des micronutriments solubles et utilisables pour les plantes. Plus tard, les plantes puisent les nutriments et purifient l’eau qui est redistribuée aux poissons par la suite. Ce système en circuit fermé a fait ses preuves.

Le tout a débuté dans leur petit garage qui désormais sert à expérimenter de nouveaux prototypes et à la germination des premières plantes avant d’être transférées dans la grande serre.  Éventuellement une nouvelle zone de semis et germination sera complétée dans la serre.

Frédérick Miner explique les différentes variétés de légumes et fines herbes produites chez Miner Aqua Green Foods. L’entreprise veut répondre à la demande en plus de se démarquer. Photo : Roxanne Lormand

Les petits héros

Les poissons utilisés sont des tilapias du Nil, un poisson à sang froid reconnu pour être résistant. Les poissons sont élevés à faible densité leur permettant ainsi d’avoir les meilleures conditions de vie possibles. «Leur nourriture se compose d’environ 40% de salade et verdure et le reste est une nourriture biologique pour poissons approuvés par le gouvernement que nous apportons» soutient Kassandra la fille de Frédérick. Ils ont choisi ce poisson, car il est très social et grossit vite. Ce sont les mâles qui mangent le plus et ainsi contribuent le plus au système. Au début, les premiers poissons ont été achetés d’une entreprise spécialisée de Toronto mais maintenant, les poissons sont capables de se reproduire dans le système. Les poissons ne sont pas stressés et vivent dans le calme. «Ce sont nos petits héros!» souligne le père et la fille.

Les poissons prennent 4 mois avant d’être transféré dans les petits bassins et un autre 2 mois s’écoulera durant lequel M. Miner peut les sexer et ainsi gérer ses prochaines productions. Les poissons sont transférés à environ 6 mois de croissance dans le grand système aquaponique de la serre, car ils produisent assez d’excréments à ce moment.

Dans le système en circuit fermé, plus de 90% de l’eau est recyclée. Le 10% restant sera l’absorption que les plantes feront et l’évaporation.

En aquaponie un point important est de toujours garder le système en équilibre.  Il faut faire attention à ne pas mettre trop de poissons ou récolter trop de légumes à la fois par exemple. Plein d’autres éléments comme la qualité de l’eau sont aussi à tester et doivent être suivis de près. Kassandra précise aussi qu’il n’est pas possible d’ajouter des produits néfastes ou des pesticides par exemple dans leur système, car cela tuerait leurs poissons. Il est important pour eux de viser une production en tout point biologique pour assurer la pérennité de l’entreprise et du système aquaponique et pour l’environnement et la santé.

Une nouvelle serre

Une nouvelle serre de 40 pieds de large par 78 pieds de long et d’une hauteur de 19 pieds a été construite depuis l’automne dernier. Le revêtement des serres est un polycarbonate de 8 mil avec 3 films de plastique en épaisseur afin de mieux activer la chaleur. La serre comporte un système de chauffage de l’eau, puisque l’absorption des plantes se fait le mieux dans une température entre 18°C et 21°C.

La nouvelle serre, qui accueille plantes et poissons, a été construite à la fin de l’année 2018. Photo : Roxanne Lormand

«En serre régulière, les légumes d’ici pourraient prendre environ une soixantaine de jours pour arriver à maturité alors que le temps dans notre système est coupé et nous permet de les produire en 4 semaines» dit Frédérick. Les légumes retrouvés comportent différentes sortes de salades comme la romaine, la buttercrunch et la gourmet, du kale, des épinards et des fines herbes telles que le persil et le basilic.  Des piments sont aussi à l’essai et les plants mêmes en avril témoignent du succès du système aquaponique par leur taille beaucoup plus imposante que n’importe quel autre plant dans un jardin en plein été.  De plus dans le système de cette entreprise «Tous les déchets des installations sont recyclés à 100%» a fait remarquer Kassandra.

Un projet bien entouré

Le projet bien démarré dans la région de Prescott-Russell aujourd’hui a demandé beaucoup d’efforts et de soutien.  «Sans l’aide de l’institution financière Desjardins Agricole de St-Isidore, de la Société de Développement communautaire de Prescott & Russell, le Groupe Convex, François Chartrand de Electric 2002, Ronald Chartrand, un ami de la famille de Curran, et l’appui de certains membres de la famille tel que Gilles Wathier, Oscar et Rita Forgues, le tout aurait été plus difficile.  Leur croyance en nous et notre projet est importante et nous sommes encore plus fiers de voir que le projet est bien réussi.» soutient Kassandra.

Frédérick et sa fille Kassandra croient profondément en leur projet d’aquaponie, une nouveauté dans la région. La demande pour les produits connaît déjà le succès. Photo : Roxanne Lormand

Long terme

Comme projet à long terme, la jeune entreprise qui connaît déjà le succès et qui s’appuie sur le principe «produire local pour manger local», aimerait bâtir une méga serre couvrant une superficie de quatre acres qui serait ouverte au public. Pour l’instant les gens peuvent prendre rendez-vous et passez aux serres pour acheter directement de l’entreprise ou peuvent se procurer des produits au petit Marché d’ici de Hawkesbury.

Le système racinaire de ces piments témoigne le succès du système aquaponique. Photo : Roxanne Lormand