le Mardi 16 avril 2024
le Lundi 14 février 2022 10:33 Volume 39 Numéro 6 - Le 4 février 2022

Connaitre les engrais naturels pour mieux les utiliser

Connaitre les engrais naturels pour mieux les utiliser
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Par : Charles De Maisonneuve

Les engrais naturels sont de plus en plus vendus dans les jardineries alors qu’il y a quelques années l’offre d’achat était surtout constituée d’engrais de synthèse. Leurs prix et leur efficacité dans le sol suscitent une certaine réticence chez les consommateurs. Or, des résultats de récentes recherches montrent que ces fertilisants ont leur place comme source d’éléments nutritifs.

Les engrais de synthèse ou chimiques

Les engrais de synthèse sont produits à partir de transformation chimique de roches et de sels ou d’une réaction entre l’azote de l’air et le gaz naturel. Ce sont des fertilisants qui fournissent rapidement des nutriments ce qui permet d’ajuster facilement les besoins pour les plantes.

Cependant, les nutriments qu’ils apportent comme le nitrate ne restent pas disponibles longtemps pour la plante, car ils sont très vite lessivés. Les pertes peuvent être limitées grâce à l’utilisation d’engrais de synthèse à libération contrôlée (ex. engrais enrobé d’une capsule de polymère Nutricote) qui vont diffuser les éléments nutritifs progressivement dans le temps. Ils sont alors libérés généralement en fonction de la température ce qui permet une synchronisation avec la croissance des plantes. Cependant, ils ont une empreinte environnementale importante lors de leur fabrication.

Les engrais naturels ou biofertilisants

La fabrication d’engrais naturels se fait à partir de matériaux naturels qui ont été plus ou moins transformés physiquement (broyage, traitement de chaleur, lavage) sans aucun traitement chimique. Ce sont des engrais à libération lente qui dépendent des microorganismes du sol pour leur décomposition et qui eux-mêmes dépendent de paramètres du sol (température, humidité, pH, teneur en carbone et azote) pour leur activité.

Inconvénient des engrais naturels

L’azote des engrais naturels devient disponible par un processus microbien de minéralisation d’engrais organiques (ex. transformation de l’azote organique contenu dans la farine de plume en azote minéral assimilable comme le nitrate). Un inconvénient de ces fertilisants est que la vitesse de libération de l’azote est très variable, ce qui rend difficile la synchronisation des apports en azote avec les besoins des plantes. Cet aspect est particulièrement important pour la culture des légumes dont les exigences de cet élément notamment, sont très fortes (ex. concombre, tomate, brocoli).

Caractéristiques de quelques fertilisants de base

Voici une description des engrais naturels dont l’information provient d’une conférence donnée par le Dr Adam Barrada de l’Université Laval (Expo Québec Vert, le 10 novembre 2021) et un rapport publié en 2006 par T.K. Hartz et P.R. Johnstone (Hort Technology).

Les farines de plume, de poisson et surtout de sang peuvent être utilisées pour un apport rapide d’azote (contenu d’environ 12% d’azote) parce que leur minéralisation se fait rapidement. Généralement, une application aux quatre semaines comble les besoins. D’autre part, la farine de poisson est le matériau le plus efficace pour un substrat froid (15oC et moins). Pour ces engrais, une partie importante de la minéralisation se fait dans les deux premières semaines (47% à 60%).

Le fumier de poulet en granule (5% d’azote) et la farine de luzerne (3-4% d’azote) moins concentrée en azote ont une vitesse de minéralisation plus faible par rapport aux autres farines. Ils sont appliqués pour un apport à long terme d’azote ou de fond. De plus, le fumier de poulet contient une quantité non négligeable d’azote inorganique directement assimilable ce qui rend possible une absorption à court terme, mais qui s’avère insuffisant pour les plantes exigeantes en azote sur une longue période. D’autre part, la farine de luzerne peut causer une immobilisation de l’azote la première semaine si le milieu est pauvre en cet élément.  

Enfin, la farine de crevette (5% d’azote) a une vitesse de minéralisation intermédiaire. Le pourcentage de minéralisation est moyen en milieu tourbeux et similaire aux farines de sang et de plumes en sol minéral. C’est un fertilisant qui pourrait être compatible avec des espèces dont l’exigence en azote est moyenne. Tout comme le fumier de poulet et la farine de luzerne, la farine de crevette contient d’autres nutriments que l’azote. Il faut en tenir compte lorsque l’on utilise ces produits pour éviter un déséquilibre de nutriments.

Ingrédients des engrais complets

La plupart des biofertilisants complets (ex. 4-1-9) vendus dans les jardineries sont fabriqués en mélangeant plusieurs engrais de base (ingrédients) tels que la farine de plume, la roche de phosphate et du Sul-Po-Mag. Le type de matériaux utilisé influence le prix et donne les caractéristiques de l’engrais. Par exemple, Le Bio-Jardin 4-3-6 (engrais McInnes) contient comme source d’azote de la farine de plume alors que l’Acti-Sol à usage multiple 5-3-2 contient que du fumier de poulet. Selon les particularités du fumier de poulet, on peut constater que le 5-3-2 n’est pas idéal pour une culture de concombre en pot alors que le Bio-Jardin est le plus approprié. D’ailleurs, la compagnie Acti-Sol vend un engrais pour contenant (Légumes et fines herbes en pots 4-2-8) qui contient du fumier de poulet et de la farine de plume.

Conclusion

L’approche conventionnelle en agriculture considère le sol comme un support inerte qu’il faut approvisionner en éléments nutritifs. À l’inverse, en agriculture biologique, on traite le sol comme un environnement vivant abritant une multitude de microorganismes. L’opération culturale prioritaire est d’incorporer des amendements comme le compost pour favoriser l’activité microbienne. Dans un deuxième temps, les biofertilisants complètent les apports en éléments nutritifs nécessaires aux plantes et au microbiote du sol. Un des avantages des biofertilisants par rapport aux engrais de synthèse est le fait qu’ils encouragent la vie microbienne autour des racines.

Le journal Agricom souhaite remercier le Dr Adam Barrada de l’Université Laval pour son soutien à la rédaction et à la révision de ce texte.

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