le Mercredi 17 avril 2024
le Mardi 4 septembre 2018 15:33 Volume 36 Numéro 01

« Donald Trump, plus de bruit que d’action » – Maurice Doyon

« Donald Trump, plus de bruit que d’action » – Maurice Doyon
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La gestion de l’offre défraie la manchette régulièrement depuis que des tentatives pour renégocier l’Entent de libre-échange nord-américain (ALÉNA) ont cours. Ce n’est pas la première fois et ses détracteurs sont nombreux, l’ex-conservateur Maxime Bernier en tête. L’Accord en lui-même occupe l’actualité et les bras de fer entre les États-Unis et ses voisins n’ont pas manqué depuis la première ronde de négociations. Les Américains ont menacé à maintes reprises de quitter la table alors que finalement les Mexicains leur ont emboîté le pas. Pendant ce temps, le Canada a maintenu sa position à savoir que l’absence d’accord est préférable à un mauvais accord.

Lundi, le gouvernement américain a annoncé qu’une entente de principe avait été conclue entre son pays et le Mexique. Voilà donc que les négociations à trois devraient reprendre. Fidèle à ses habitudes, Donald Trump va sûrement continuer à malmener les producteurs laitiers canadiens sur Twitter. Mais quelle importance doit-on accorder à ces propos? Ont-ils vraiment le pouvoir de menacer le système de la gestion de l’offre?

Voilà l’opinion du Professeur Maurice Doyon sur cette question.

D’abord, il dit ne toujours pas s’expliquer cette fixation du président Trump.

 « Moi si je suis Américain, ce que je veux c’est un accès au marché. Présentement si on donne un accès au marché laitier comme on l’a fait avec l’OMC, avec le nouveau Partenariat transpacifique et l’Accord économique et global avec l’Union européenne, ça s’additionnerait au total, mais je ne pense pas que ça remettrait  l’offre de la gestion en question. Si c’est un accès au marché que je veux, qu’est-ce que j’en ai à faire de la gestion de l’offre. Croyez-vous vraiment que les Américains vont refuser de signer parce que l’on garde la gestion de l’offre? »

De l’avis de M. Doyon, comme le Canada avait consenti une part de marché aux Américains dans le Partenariat transpacifique et qu’ils se sont finalement retirés, l’accès au marché des produits frais (lait, crème, yogourt) risque de ne pas être utilisé par les autres partenaires, les coûts de transport étant trop important sur ces produits pour les Néo-Zélandais et les Australiens. Le Canada pourrait aménager des accès pour ces produits pour les Américains. Bien que tout accès supplémentaire soit une mauvaise nouvelle pour notre industrie laitière, ceci ne remettrait pas en cause la gestion de l’offre.

Nous pourrons possiblement faire des concessions « M. Trump doit donner l’impression d’avoir gagné quelque chose. Même si la victoire est fictive ça vaut beaucoup d’argent pour le gouvernement républicain.

M. Doyon met aussi en relief le fait qu’il y a un écart certain entre les Tweets du président et l’opinion de l’appareil politique américain.

Avec les élections qui approchent,  il y a aussi urgence à signer. Le gouvernement américain a dû injecter 12 milliards de dollars américains dans son secteur agricole pour composer avec les contre-réactions de ses partenaires d’affaires. Il a voulu faire pression, mais ne s’attendait pas à une riposte aussi cinglante. Exportant lui-même un tiers de sa production agricole, il s’est mis en fâcheuse situation et sa popularité n’est pas montante.

« Au Wisconsin, l’appui des agriculteurs faiblit et dans quelques mois il y a les élections. Il est clair que les Américains ont intérêt à régler avant. Compte tenu de cet agenda,  je ne m’attends pas à des concessions importantes », conclut M. Doyon.

 Maurice  Doyon est Professeur titulaire à la Chaire de recherche économique sur l’industrie des œufs, Directeur du programme de maîtrise en économie agroalimentaire Fellow CIRANO et Chercheur CREATE au Département d’économie agroalimentaire et des sciences de la consommation à Université Laval.