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le Jeudi 19 janvier 2012 0:00 Volume 29 Numéro 10 Le 20 janvier 2012

La bataille se poursuit

La bataille se poursuit
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La compagnie minière Highland Compagnie, qui travaille depuis quelque temps à la mise en place d’une mégacarrière de calcaire sur des terres agricoles à Melancthon dans le sud de l’Ontario, est soumise à une évaluation environnementale provinciale. Des pressions exercées par le North Dufferin Agricultural and Community Taskforce (NDACT), avec l’aide de la municipalité de Melancthon, ont fait en sorte que le gouvernement exige cette évaluation nécessaire à l’obtention de leur permis d’extraction. Il s’agit d’une première dans la province puisqu’il n’a jamais été question en Ontario d’un projet d’une telle envergure, selon ce groupe de défense des citoyens.

 

Selon le NDACT, la compagnie prévoit creuser 200 pieds en dessous de la nappe phréatique, sur une surface de 2 316 acres. Cette carrière serait la plus grosse en son genre au Canada.

 

Sur le site du NDACT, on apprend également que Highland puisera à même le sol 600 millions de litres d’eau par jour afin d’assécher le cratère pour en extraire la roche, une quantité qui en inquiète plusieurs. NDACT craint les effets nocifs sur l’environnement qu’auront les nombreux passages des camions de transport, en plus des conséquences de la diminution des terres agricoles dans cette région.

 

Carl Cosack, président de NDACT est convaincu que ce projet trop dommageable pour l’environnement ne peut voir le jour. « C’est complètement fou que chaque jour ils puisent une quantité d’eau potable qui est égale à la consommation journalière de 2,7 millions d’habitants. Comment le gouvernement de l’Ontario peut permettre une telle chose! », clame M. Cosack.

 

Le groupe de défense craint également que l’eau potable de la ville ne soit affectée. Carl Cosack explique que Melancthon est une région surélevée où se croisent quatre cours d’eau importants. Sur leur site Internet, Highland se défend que leur projet n’aura aucun impact sur l’eau et l’environnement puisqu’ils ne puiseront pas leur ressource dans le même cours d’eau que la municipalité. Selon leurs dires, ils ne retireront du sol que 3,7 millions de litres d’eau quotidiennement, soit l’équivalent de l’utilisation d’un système d’irrigation de ferme circulaire par jour.

 

NDACT ne croit pas que les techniques utilisées afin d’analyser les cours d’eau souterrains sont exacts. « Il n’y a aucune preuve écrite qui prouve les calculs de distance et la magnitude entre les différents cours d’eau », affirme M. Cosack.

 

Afin d’obtenir des réponses à ses questions, le conseil municipal de Melancthon a engagé des experts et attend leurs opinions afin de s’assurer de l’exactitude du rapport d’Highland Compagnies sur l’impact environnemental qu’auront leurs activités. Selon le maire, Bill Hill, si leur rapport dit vrai et que le gouvernement de l’Ontario approuve l’ouverture de la carrière suite à l’évaluation environnementale, Melancthon sera contraint à accepter le projet.

 

Dans l’évaluation environnementale, la compagnie minière doit présenter son plan d’utilisation de l’eau en plus de prouver que celui-ci ne sera pas dommageable pour la qualité de l’eau de la municipalité.

 

Impacts socio-économiques

 

Le groupe de citoyens est convaincu que la construction de la carrière affectera l’économie de la région, et ce, même si Highland promet que leur projet créera 450 emplois. « L’industrie du tourisme est très forte dans notre région et crée plus de 1500 emplois. Avec la venue de la carrière, le tourisme risque de diminuer grandement et entraînera des pertes d’emploi dans ce secteur. Cela est sans compter les emplois dans le domaine agricole qui ont déjà disparu et qui continueront à diminuer. Leur promesse d’offrir 450 emplois n’équivaut pas aux pertes qu’ils causeront », explique M. Cosack. 

 

L’établissement de la carrière de calcaire à Melancthon a déjà un impact social important sur la municipalité, constate le président de NDACT. Selon lui, l’achat de terrains par Highland a déjà délocalisé 30 familles, et ce ne serait qu’un début. Bill Hill explique que lors de l’achat des terres agricoles, Highland n’a pas mentionné aux agriculteurs leurs intentions d’implanter une mégacarrière. «  Highland cultive des pommes de terre depuis longtemps. Les gens croyaient que l’achat de terrain était dans le but d’agrandir l’entreprise de patates. Highland n’a pas menti à la population, mais ils ont manqué de transparence, » affirme le maire.

 

De leur côté, Highland Compagnies dément sur son site Internet la majorité des arguments de défense de NDACT, tant au niveau environnemental, que social et économique. Selon eux, le calcaire est nécessaire à la construction et au développement de notre société. Les chiffres sur leur site Internet indiquent que d’ici 20 ans, l’Ontario aura besoin approximativement de 186 millions de tonnes de calcaire afin de construire des routes, des écoles et des banlieues.

 

De l’espoir chez NSACT

 

Carl Cosack espère que le projet d’Highland ne se concrétise jamais. « Ils ne creuseront jamais dans notre municipalité. Le projet est trop fou! », soutient-il. Le groupe de défense ne compte pas rester inactif face à la menace de la compagnie minière de s’établir dans leur région. Après avoir convaincu le gouvernement de l’Ontario d’exiger une évaluation environnementale, ils font maintenant pression sur le gouvernement fédéral afin qu’il impose à son tour le même genre de document. L’incompréhension de NDACT face à cette situation est palpable. Ils ne peuvent comprendre comment un gouvernement peut accepter qu’une compagnie minière détruise des fermes et un système alimentaire qui, selon eux, est la base de la vie.