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le Mercredi 19 juin 2013 11:08 Volume 30 Numéro 20 Le 21 juin 2013

Services en français déficients chez Hydro One

Services en français déficients chez Hydro One
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Après les offices de commercialisation agricoles, voilà que c’est au tour d’Hydro One de susciter la grogne des Franco-Ontariens. Des producteurs agricoles de l’Est ontarien se plaignent des lacunes linguistiques de la société énergétique, alors que celle-ci n’est pas être soumise à la Loi sur les services en français.

Marc et Chantal Bercier ont récemment baissé les bras après avoir attendu des mois pour obtenir la traduction en français d’un contrat prévoyant des droits de passage à Hydro One sur leur propriété. La construction d’un biodigesteur d’une entreprise agricole voisine nécessitait le passage d’une ligne sous haute tension devant la résidence des Bercier.

Après plusieurs mois d’attente, le couple a été contraint de signer un contrat unilingue anglophone de cinq pages au début juin, alors qu’ils avaient demandé une traduction en français pour mieux en saisir tous les détails.

« On comprend l’anglais, mais on aurait aimé mieux se faire servir en français, surtout pour un document légal comme celui-là », se justifie Chantal Bercier. « Ce n’est pas qu’on voulait s’opposer à [ce droit de passage], c’est qu’on voulait avoir accès aux documents en français », ajoute-t-elle.

Cette dernière avoue cependant avoir signé un peu à contrecœur ce contrant rédigé uniquement en anglais par la firme d’avocats Davis LLP Legal Advisor qui représente Hydro One. « Ça ne me tentait pas d’embarquer dans une guerre linguistique [avec eux] », explique-t-elle.

Pourtant, un échange de communications écrites entre une employée de la firme et Mme Bercier indique clairement que le cabinet s’engageait à traduire ledit contrat. « We are looking to have your document translated for you »*, lui avait promis par courriel l’employée en question le 10 septembre 2012.

Neuf mois plus tard, n’ayant rien obtenu, ni communication de la firme, ni traduction, les résidents de St-Isidore se sont résignés. « C’est bien de valeur. On se bat pour notre langue, mais je ne suis pas prête à passer beaucoup de temps à me battre », précise Mme Bercier qui dirige avec son conjoint un centre de criblage de grains.

« Notre compagnie s’efforce de fournir des factures en français à notre clientèle francophone et en anglais pour les anglophones », rétorque Marc, qui aurait espéré qu’Hydro One en fasse autant.

Selon le directeur général de l’Union des cultivateurs franco-ontariens, ce délai de neuf mois est déraisonnable. Ce dernier indique que son association offre un service de traduction dans un délai variant de trois à cinq jours ouvrables.

« Pour un dépliant, ça peut passer, mais pour un document légal, c’est complètement différent. Il y a clairement un manque de volonté dans ce cas-là», juge M. Durand.

Commissariat aux services en français déçu

La difficulté des Franco-Ontariens à obtenir des services dans la langue de leur choix chez d’Hydro One ne date pas d’hier nous a indiqué le Commissariat aux services en français de l’Ontario. Selon ce qu’a appris Agricom, 11 plaintes ont été formulées à l’endroit de la société depuis 2010, mais puisqu’elle n’est tenue de respecter aucune obligation en matière linguistique, nulle sanction ne peut lui être imposée.

« Quand on reçoit les plaintes, ça nous aide à cerner la situation et à nous donner d’autres arguments à fournir au ministère de l’Énergie [pour faire avancer la cause]. Bref, ça aide le Commissariat […] à davantage pousser la note auprès du ministère », a précisé le porte-parole du commissariat, Simon Côté.

D’ailleurs, le commissaire en a clairement fait mention dans son dernier rapport annuel, dévoilé le 5 juin. Il dénonce le fait que les sociétés énergétiques crées en vertu de la Loi sur l’électricité ne soient pas tenues de communiquer dans les deux langues officielles.

Dans son rapport 2011, il en a même fait une recommandation à laquelle le ministre de l’Énergie avait répondu qu’il allait travailler avec les sociétés comme Hydro One pour déterminer comment elles pouvaient mieux répondre aux besoins des francophones de l’Ontario.

« Le commissaire ne se disait pas complètement satisfait de cette approche puisqu’elle misait d’abord sur la volonté des sociétés énergétiques plutôt que sur une obligation légale », a indiqué Simon Côté.

Ce dernier a précisé que le ministère travaillerait actuellement sur le dossier.

*Traduction libre : « Nous verrons à faire traduire ce document pour vous. »