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le Vendredi 20 janvier 2012 0:00 Volume 29 Numéro 10 Le 20 janvier 2012

Incitation à la gourmandise

Incitation à la gourmandise
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Certaines personnes ont l’agriculture dans le sang, comme si à leur naissance, elles étaient tombées dans une potion magique concoctée de produits maraîchers locaux. C’est le cas d’un couple de producteurs de chevreaux de lait d’origine québécoise qui vient tout juste de s’installer dans l’Est ontarien pour démarrer une épicerie fine, Les gourmandises caprines. Leur mission : promouvoir l’agriculture locale.

France Gagnon et son conjoint Jacques Parent n’ont pas grandi sur une ferme et jusqu’à il y a une dizaine d’années, ils n’avaient jamais eu d’animal de ferme. Cela ne leur empêchait pas d’encourager les producteurs locaux. Ils se sont toujours souciés de ce qu’ils mettaient dans leur assiette.

Jacques a travaillé toute sa vie dans l’industrie des portes et fenêtres jusqu’à ce qu’il prenne sa retraite en 1999. Quant à France, elle œuvrait au sein de la fonction publique provinciale lorsqu’un cadeau inattendu est tombé du ciel. Le gouvernement du Québec a offert à ses employés une retraite anticipée.

« Ils nous ont mis une belle proposition sur un beau plateau d’argent et ils s’attendaient à seulement 17 000 départs… On en a eu 32 800 et j’en suis une de celles-là », explique France, non sans un brin de satisfaction dans la voix.

Vers de nouveaux défis
Les nouveaux retraités décident donc de se lancer vers un nouveau défi.

Propriétaire d’une ferme familiale inexploitée, Jacques décide de jouer le tout pour le tout et de démarrer en production porcine. Ça n’a pas tourné comme ils le désiraient et le prix n’a cessé de chuter. Découragés, ils décident de vendre leurs bêtes et de rénover les bâtiments.

C’est à ce moment qu’ils se font solliciter par Woolwich Dairy, un transformateur de lait de chèvre qui leur offre un contrat alléchant : 300 000 litres par année. Ils décident donc d’accepter la proposition et procèdent à la construction d’une salle de traite ainsi qu’à l’aménagement de parcs. Le couple fait l’acquisition de plusieurs chèvres pur-sang dont on disait qu’elles étaient gestantes. Après cinq mois d’attente, aucun chevreau ne s’était pointé le bout du nez. Ils s’étaient fait berner.

Ne reculant devant rien, ils se relèvent et vont trouver d’autres chèvres. Ils s’aperçoivent cependant très vite que le contrat qu’ils avaient signé dépassait largement leur capacité de production. Ils résilient donc leur contrat avec Woolwich et abandonnent la production laitière. Mais quoi faire avec toutes ces chèvres maintenant ?

Ils essuient leur échec du revers de la main et trouvent la solution qui allait propulser le couple vers un succès grandissant. Et pourquoi pas du chevreau de lait !

Fille d’une enseignante en alimentation, France décide de mettre à profit ses talents culinaires et de transformer ses produits de la ferme. Ils réussissent à vendre leurs produits en parcourant les marchés locaux, mais la majorité d’entre eux sont vendus à leur boutique de Thetford Mines, une épicerie fine fleurissante. Mais un événement les amène à tout vendre et à venir s’installer en Ontario, un choix qu’ils ne regrettent pas.

Ils trouvent plusieurs appuis au sein de la communauté franco-ontarienne, notamment auprès du Réseau agroalimentaire de l’Est ontarien qui leur fournit de l’aide pour trouver notamment un nouveau local, ainsi que pour assumer une partie du loyer pendant le démarrage.

Du local, que du local
Toutes les recettes utilisées par France proviennent de sa grand-mère. Et elles font fureur. Ce serait d’ailleurs considéré comme un péché de repartir de leur boutique sans un pot d’écorces de melon d’eau marinées, une terrine de chevreau à l’érable et aux bleuets ou une mousse de foie de chevreau à la cerise noire… De purs délices!

Si bien que ses produits sont livrés à la résidence officielle du chef de l’opposition de la Chambre des communes, Madame Nicole Turmel.

Et France ne se contente pas de cuisiner avec ses aliments. Elle fait toute une gamme de produits concoctés à partir d’aliments locaux. D’ailleurs, ils s’approvisionnent dans un rayon de 100 km de la boutique de Rockland. Pas question d’acheter des fraises du Mexique ou des patates des États-Unis. Tout est local.

«Chaque petit producteur est important pour nous », raconte Madame Gagnon pour qui les produits des autres producteurs sont tout aussi importants à ses yeux. Plus l’offre est vaste, plus la population sera incitée à manger local, voilà leur philosophie.

Cours de cuisine
Monsieur Parent travaille actuellement à aménager une cuisine capable d’accueillir plusieurs étudiants à la fois. C’est que prochainement, France offrira des cours de cuisine, en collaboration avec Vidéotron. La compagnie de câblodistribution diffusera le cours pour promouvoir une saine alimentation et la consommation locale.

Bref, si vous passez dans l’Est ontarien, faites un petit détour par Rockland. Vous n’en serez pas déçu, croyez-en mes papilles.