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le Jeudi 4 février 2021 11:12 Volume 38 Numéro 6 - Le 22 janvier 2021

Stress thermique chez les vaches taries… et si on se préparait pour l’été ?

Stress thermique chez les vaches taries… et si on se préparait pour l’été ?
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Par : Hugues Ménard T.P. , Conseiller spécialisé Sollio Agriculture

On parle beaucoup de stress thermique (ST) ces dernières années et avec raison ; il est indéniable que les changements climatiques commencent à affecter notre climat, jusqu’ici plutôt nordique. Nous venons de vivre trois étés particulièrement chauds, chacun constitué d’un mois de juillet qui a battu des records de haute température. Les experts-conseils d’Uniag Coopérative ont donc décidé de mener un projet très pertinent, depuis deux ans, en implantant des sondes dans le rumen de certaines vaches, afin de suivre les variations de leurs températures corporelles durant la canicule. Vous en entendrez certainement parler, si ce n’est déjà fait. L’impact du ST sur la production de lait et de ses composantes est déjà connu, mais qu’en est-il des vaches taries et de celles en transition ? On s’imagine facilement que les vaches taries, ne subissant pas le stress de la production, seront moins affectées par la chaleur et que son impact chez elles sera minime, mais est-ce bien le cas ?

En 2010, nous avons assisté à une conférence sur le sujet par le Dr James Spain de l’Université du Missouri, lors d’une journée pour les producteurs à Alexandria. En plus de nous entretenir sur la pertinence de maintenir la ventilation la nuit, lorsque la température se rafraichit, il nous avait présenté les résultats d’une étude menée sur des vaches en transition. Dans cette étude (Spain, 2005), il avait démontré qu’en rafraichissant les vaches en préparation au vêlage de façon adéquate, on pouvait produire 2 litres de lait supplémentaires par vache, par jour, durant au moins les 6 premières semaines de lactation.

Il citait aussi d’autres études qui démontrent que de rafraichir les vaches taries entraine une augmentation de la consommation de matière sèche, tant chez la vache tarie que chez celle en préparation, et une diminution de la consommation d’eau (50 l vs 80 l). Nous supposons donc que ces vaches perdent moins d’eau et sont moins déshydratées en raison du stress thermique (Avendano, reyes et al, 2006). Cette étude avait aussi démontré que l’atténuation du ST des vaches en transition permet la production d’une plus grande quantité de colostrum de meilleure qualité.

Un webinaire présenté par le Hoard’s dairyman en février l’an dernier revenait sur le sujet. Dans cette présentation on cherchait d’abord à comprendre pourquoi l’impact maximal du ST semble survenir quelques semaines après les pics de températures (voir Fig. 1).

Des études menées par G. Dahl et son équipe de l’Université de Floride ont permis de tirer plusieurs conclusions. On a comparé les résultats et les comportements de groupes de vaches disposés dans deux étables identiques, sous les mêmes conditions de température et d’humidité. Cependant, la ventilation différait d’un groupe à l’autre. En fait, les deux étables étaient équipées de ventilateurs et de brumisateurs, mais dans l’une des deux, ces équipements avaient été mis à l’arrêt. Il ne fut pas étonnant de constater que la température corporelle des vaches taries sans ventilation avait augmentée de 0,4 degré Celsius, donc, pas suffisamment pour parler de fièvre, mais assez pour provoquer des changements à leur métabolisme. On a aussi observé une production de lait supérieure lors de la lactation suivante pour le groupe de vaches avec ventilation durant le tarissement, et ce, tout au long de la lactation, même si toutes les vaches, après le vêlage, ont été soumises à la même ventilation (voir figure 2).

Voilà qui explique en partie le fait que la production par vache tarde à revenir à la normale après une canicule : les vaches qui ont souffert de ST durant le tarissement produiront moins de lait après le vêlage. Sauf quelques rares exceptions, il y a des incitatifs à produire en automne, « le lait d’automne » (12 jours en 2020), ce sont les taries d’aout et septembre qui feront ce lait !

Plusieurs autres conclusions émanent de ces recherches. Par exemple, ce serait parce que la prolifération des cellules de la glande mammaire est plus importante quand il y a moins de ST que la production serait plus élevée. Aussi, il y a un impact sur la génisse en croissance dans l’utérus au même moment. En effet, on a constaté une diminution de la longueur de la gestation (voilà pourquoi nos vaches vêlent avant la date prévue !) ce qui a un impact sur le veau à naitre : il est plus petit. Le ST aura aussi un impact sur l’absorption apparente des IgG du colostrum par le veau. Enfin, bien que le veau finisse par devenir une taure qui vêlera au même poids (développement) et âge que ses congénères, le ST subit dans l’utérus affectera la production de la première lactation de ces génisses (voir figure3).

En conclusion, nous pouvons dire que le ST à un impact énorme sur les vaches au tarissement. En bref :

  • Réduction de la production lors de la lactation à venir
  • Réduction du poids du veau à la naissance et au sevrage (gestation plus courte)
  • Diminution de la production future de la génisse à naitre
  • Comme pour toutes les vaches :
    • Diminution de la performance reproductive
    • Diminution des fonctions immunitaires

Alors, si on a pensé à améliorer la ventilation dans les étables avec les canicules des dernières années, n’oublions pas les vaches taries et celles en préparation au vêlage !

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