Pour certains, dont Thomas Vinet, le jeu en vaut la chandelle. Le producteur s’est tourné vers l’agriculture biologique en 2017. « Ça prend du temps de plus … mais oui ça vaut la peine », dit-il au téléphone.
L’agriculteur situé dans l’Est ontarien a dû renoncer à faire pousser du maïs sur sa terre. Le sol argileux des champs ne permettait pas la culture du maïs sans dépendre de fertilisants chimiques. Réduire l’utilisation de produit chimique et de produit dangereux pour la planète demande un changement dans le système. Selon les agriculteurs contactés, il faudra s’éloigner de la monoculture et retourner à des pratiques traditionnelles comme la rotation des champs. Cette méthode permet une diversité biologique qui réduit le risque que des maladies et des parasites infestent les plantations.
En plus, si la rotation des cultures est faite de façon stratégique, elle permet de renflouer le sol de précieux nutriment dont l’azote. En effet, des plantes comme les pois jaunes sont capables d’absorber l’azote présent dans le sol grâce à une bactérie qui se loge dans leur racine. La bactérie et la plante ensemble permettent de transformer les gaz d’azote en une forme utilisable pour les plantes.
Or, cette technique demande qu’une partie de sa terre ne soit pas rentable. Pire, le producteur doit débourser de sa poche pour cultiver une plante qui ne lui rapportera rien sur le marché.
L’autre technique pour améliorer les nutriments du sol sans dépendre entièrement des fertilisants azotés est la pratique de culture de couverture appelée «cover crop» entre les rangs . Il s’agit d’une technique de plus en plus répandue. La culture de couverture est ensemencée dans l’espace entre deux rangs de la culture principale qu’un agriculteur cultive à des fins financières («cash crop»). La science derrière permet de démontrer que la pratique de culture de couverture permet de diminuer l’érosion, sécheresse, mais surtout d’ajouter de la matière organique au sol.
Par contre, la pratique de «cover crop» demande de passer au moins 2 fois plus de temps dans les champs pour l’ensemencement. Un passage pour la culture de couverture et un passage pour le «cash crop». Loin d’être simplement une question d’essence et de temps, il faut comprendre la dynamique des plantes en fonction du sol. Il s’agit aussi d’un jeu d’essai-erreur pour arriver à la parfaite combinaison qui permet les meilleurs rendements.
Encore une fois, il s’agit de dépenser du temps et des ressources dans une culture qui n’a aucune valeur commerciale pour son producteur. Le manque de main-d’œuvre du milieu est aussi un obstacle pour les producteurs en tout genre.
Il est aussi possible d’employer ces techniques sans tomber dans de l’agriculture biologique. Pour Marc Bercier, c’est de l’« agriculture raisonnée». Encore une fois, cette pratique demande du temps et des ressources. En fait, pour maximiser l’emploi de fertilisants azotés, les agriculteurs peuvent tester leur champ pour venir ajuster l’épandage de fertilisant au besoin des plantes. De cette façon, l’azote est utilisé en quasi-totalité par la plante et rejette ainsi moins de Protoxyde d’azote (N2O) dans l’air. C’est justement ce gaz qui est un danger pour la couche d’ozone.
Pour passer d’épandage à la volée d’engrais à une utilisation minutieuse, cela demande de de procéder à des échantillonnages des champs. Il faut alors se procurer l’équipement pour faire les tests soi-même, ou envoyer des échantillons de champs à un laboratoire. Or comme les sols sont changeants avec la température et la croissance des plantes, l’échantillonnage doit être pris à plusieurs moments dans l’année.
Encore une fois, cette technique demande un investissement de temps, d’argent et de ressource du producteur lui-même.