Producteurs de semences et propriétaires de la Ferme Agriber de Saint-Isidore dans l’Est Ontarien Marc et Chantal Bercier viennent de recevoir le Prix 2016 de la conservation des pollinisateurs des agriculteurs et ranchers canadiens. Cet honneur décerné conjointement par l’Association canadienne pour les plantes fourragères (ACPF) et le Pollinator Partnership (P2) vise à reconnaître les personnes qui dans une exploitation agricole ont contribué notablement à la conservation d’écosystèmes, en créant des habitats additionnels et en protégeant des espèces pollinisatrices.
Cette reconnaissance les hisse du même coup au rang des agriculteurs nord-américains applaudis pour leurs pratiques. La cérémonie de remise s’est tenu le 18 octobre au Département américain de l’agriculture à Washington D.C.
Le jury a particulièrement apprécié, un projet de réaménagement d’une zone humide d’une superficie de six acres, mené par Marc et Chantal Bercier, avec le concours d’ALUS (AlternativeLand Use Services), un petit paradis au milieu de champs agricoles.
« Le but c’était de créer un habitat naturel dans une zone de grandes cultures », explique Marc Bercier.
Dans cette section on retrouve un site conçu pour les pollinisateurs qui offre une belle variété de plantes et de fleurs sauvages. En son centre, une étendue d’eau composée de trois bassins, le premier servant de zone préfiltrante, le suivant de zone humide et finalement le lac, contribue d’une part à éviter la pollution dans la rivière Scotch à proximité tout en offrant un milieu de vie à une faune et une flore variée. Un déversoir fixe a été installé pour permettre à l’eau de surface filtrée de lac de s’écouler lentement vers la rivière.
Avant l’aménagement du site, il n’y avait qu’un petit fossé de ferme, une rigole en fait, alimentée par un système de drainage installé sur les 500 acres de terres cultivées aux alentours. L’eau contenant des sédiments et des nutriments agricoles s’écoulait directement dans la rivière.
En plus de ces avantages, Marc Bercier estime que l’humidité générée par le site évite aux champs environnants de pâtir de la sécheresse ou à tout le moins d’en subir un moins grand stress.
« Il s’agit de conserver l’eau pour nourrir nos nappes d’eau phréatiques et de garder nos récoltes hors du danger de la sécheresse. »
Les travaux ont commencé à l’automne 2015 et se sont poursuivis jusqu’au printemps 2016 après une étape de conception rigoureuse.
Pour ce projet, il est d’abord allé frapper à la porte de la Conservation de la Nation sud. « C’est là qu’on m’a dirigé vers ALUS. »
Marc Bercier est devenu un fervent promoteur du programme ALUS, qui en plus de sensibiliser les agriculteurs aux bienfaits des pratiques écologiques, finance plusieurs d’entre elles. Il en est maintenant membre du conseil d’administration et compte bien le faire connaître au plus grand nombre.
Le ministère de l’Agriculture de l’Agroalimentaire et des Affaires rurales de l’Ontario ainsi qu’Agricuture et Agroalimentaire Canada ont aussi participé au projet et des recherches continuent à s’y effectuer pour tenter de faire la preuve ou à quantifier les gains réalisés en contrant l’érosion.
« Quand même tu prendrais 3 mètres de terrain pour ça au lieu de le cultiver tu vas être gagnant. On veut être les premiers à le prouver. »
Pour ce projet, la CNS a donné près de 1 000 arbres que l’organisme Boisés Est l’a aidé à planter. Ces différentes essences, chêne, érable, arbres fruitiers pour les noix et aulnes pour l’ombre. Ils contribuent à solidifier les sols et absorber les nutriments. Enfin, ils participent à créer un riche écosystème,
C’est sans aucun doute le dada de cet agriculteur, la biodiversité, combinée à un grand appétit pour la recherche et le développement. Il aime dire qu’il fait de l’agriculture raisonnable.
Depuis une vingtaine d’années, des parcelles de ses terres servent à la recherche pour différents ministères pour lesquels il met ses installations à la disposition du personnel. C’est un gène dont il semble avoir hérité.
« Mon père (Jean L. Bercier) a été le premier à reboiser les berges du bassin versant de la rivière Scotch. On lui a décerné le Woodland Improvment Award pour cela. Il était aussi impliqué avec la Conservation de la Nation Sud. »
Il rappelle aussi que son frère, feu Pierre Bercier, également président de l’Union des cultivateurs franco-ontariens de 2002 à 2006, est à l’origine de l’identification des puits en milieu agricole pour éviter la contamination accidentelle lors d’épandage d’engrais ou d’arrosage de pesticides, entre autres.
C’est de famille et à cet égard il est bien soutenu par son épouse Chantal qui veille à la bonne marche des mille et un projets en marche dans l’entreprise et son fils Guillaume qui est son bras droit.
La famille Bercier cultive 3 000 acres de terrain pour la semence, blé, soya (GMO et non GMO), du chanvre industriel et maïs grain. Elle a introduit les cultures intercalaires et les zones tampons et procède à la transition à la culture biologique dans certaines parcelles. On la connaît aussi pour son centre de criblage.
« Chez nous il y a quatre valeurs : l’honnêteté, l’intégrité, la transparence et le respect. On cultive dans le respect de notre environnement. Je veux ramener d’autres cultures et on fait de la recherche pour rentabiliser la biodiversité.»
La Ferme Agriber a établi un plan pour l’établissement de sites pollinisateurs. Un site d’importance se trouve à proximité du village pour sensibiliser la population à l’importance d’offrir abondance et variété aux abeilles et leurs semblables. On y trouve des plantes indigènes et d’autres introduites pour répondre à ces objectifs. On s’assure de maximiser la période de floraison. Par ses pratiques et ses croyances, cette famille semblait toute désignée pour remporter cette grande reconnaissance.