Ottawa estime que la réplique du président russe Vladimir Poutine aux sanctions imposées à son pays pour son rôle dans la crise ukrainienne démontre un manque flagrant de vision.
De passage à Montréal, le ministre de l’Industrie, James Moore, s’est dit convaincu que les mesures annoncées par la Russie – et qui visent aussi le Canada – nuiront davantage à sa propre population, puisque la Russie dépend lourdement de l’importation alimentaire.
« Ça va frapper les consommateurs russes beaucoup plus que ça va toucher l’économie du Canada », a déclaré M. Moore, en marge d’une annonce à Montréal.
Il a précisé que le Canada, tout comme la communauté internationale, n’avait d’autre choix que d’intervenir devant l’approche « irresponsable » de la Russie en Ukraine.
« C’est quelque chose d’affreux, qui est irresponsable et ça déstabilise le monde entier », a-t-il dit.
La Russie a interdit l’importation de la majorité des denrées alimentaires – notamment les viandes, poisson, produits laitiers et fruits et légumes – en provenance du Canada, des États-Unis, de l’Union européenne, de l’Australie et de la Norvège.
Le Canada a exporté pour 563 millions $ de produits agricoles en Russie en 2012, dont 87 pour cent – soit 492 millions $ – était de la viande de porc, une importante industrie au Québec.
L’industrie porcine impuissante
Bien que le ministre Moore ait tenté de se faire rassurant face à l’industrie porcine canadienne, celle-ci a très mal accueilli la nouvelle, la Russie étant son troisième client international derrière les États-Unis et le Japon.
Le plus important exportateur, Olymel, exploite deux usines d’abattage de porc, qui sont principalement dédiées aux coupes de porc favorisées par la clientèle russe: une à Vallée-Jonction, en Beauce, et l’autre à Red Deer, en Alberta. Chacune de ces usines emploie environ 1300 personnes.
« Olymel est impuissant devant une telle décision », a admis son porte-parole, Richard Vigneault, indiquant que l’entreprise ferait tout en son pouvoir pour trouver d’autres débouchés aux produits destinés à la Russie.
Il a cependant précisé que les 2600 employés des deux usines touchées n’avaient rien à craindre.
« Il faut rassurer nos employés. Nous sommes un très important producteur de porc, nous exportons dans 65 pays. Il n’est pas question que nos employés soient touchés », a indiqué M. Vigneault.
De son côté, la Fédération des éleveurs de porc du Québec a fait preuve d’une inquiétude modérée, puisque la convention de mise en marché qui régit l’industrie au Québec garantit à toutes fins pratiques l’achat de leur production et ce, au prix des marchés américains.
« Le manque à gagner pour les producteurs ne sera pas aussi grand que pour les abattoirs », a expliqué le président de la fédération, David Boissonneault.
Cependant, la fédération reconnaît qu’une réduction importante de la demande pourrait éventuellement pousser les prix à la baisse, et affecter les producteurs québécois.
« C’est certain que ce n’est pas une bonne nouvelle pour nous, parce que le marché russe est un marché très important », a-t-il indiqué.
Voici la liste des produits canadiens touchés par cette mesure:
– boeuf frais, réfrigéré et congelé;
– porc frais, réfrigéré et congelé;
– viande de volaille et tous sous-produits comestibles;
– viande fumée, salée, marinée ou séchée;
– poissons et crustacés;
– palourdes et autres invertébrés marins;
– lait et produits laitiers;
– légumes, racines comestibles et plantes tubéreuses;
– fruits et noix;
– sous-produits de la viande et sang, et produits faits de ces éléments;
– produits prêt-à-manger, incluant fromages et fromages cottages faits à partir de graisse végétale.