C’est le 22 janvier que notre ministre de la Santé, l’Honorable Madame Ginette Petitpas Taylor, a présenté officiellement au grand public le concept du nouveau Guide alimentaire canadien tant attendu. Le fameux guide arc-en-ciel, tel que nous le connaissions, datait déjà de 2007 et aucun changement n’y avait été apporté.
Le nouveau guide se veut plus d’actualités en ayant des ressources complémentaires facilement accessibles en ligne ou à l’aide d’appareils mobiles. Permettre l’interaction avec le guide alimentaire semblait de mise rendu en 2019. Sur le guide alimentaire canadien en bref, on peut apercevoir que les quatre groupes alimentaires traditionnels ont été remplacés par un groupe de légumes et de fruits, un groupe d’aliments à grains entiers et un groupe d’aliments protéinés. Autre fait important, le guide a aboli le nombre de portions recommandées pour chaque Canadien selon la tranche d’âge, pour laisser savoir que l’on doit miser sur notre sentiment de satiété. L’image présentée nous suggère une demi-assiette de légumes et fruits pour un quart de grains entiers et un quart d’aliments protéinés. Lorsqu’on interroge les concepteurs et représentants de Santé Canada sur l’abolition du nombre de portions et si nous devons plutôt viser une alimentation telle qu’on le voit dans l’image du guide, on répond que oui, on devrait viser de telles quantités dans la mesure du possible tout en écoutant notre corps et favoriser les fruits et légumes et les aliments protéinés d’origine végétale. «Manger des aliments protéinés d’origine végétale plus souvent favoriserait une meilleur santé,» déclarait Docteur Alfred Aziz, qui prendra la relève durant l’année à titre de directeur général de la politique, de la promotion et de la nutrition à Santé Canada, lors d’une conférence de presse d’information technique exclusive et réservée aux médias avant le lancement officiel à laquelle Agricom était présent.
Le nouveau guide mise aussi sur des compétences alimentaires. Cuisinez plus souvent, manger en bonne compagnie, faire attention au marketing alimentaire et limiter notre consommation d’aliments élevés en sodium, en sucres ou en gras saturés sont des concepts à privilégier selon Santé Canada. Suivre les compétences alimentaires recommandées dans le document permettrait même de réduire les déchets au Canada, ce qui serait bénéfique pour notre environnement.
Également, l’eau est la boisson de choix numéro un dans le guide. Prendre un bon repas accompagné d’un bon grand verre d’eau est la meilleure option qui soit. Un aspect qui ébranle les fervents défenseurs d’un bon verre de lait. On recommande encore le verre de lait, mais il devrait être plus faible en gras. On prône aussi d’éviter autant que possible les boissons sucrées.
Ce qui ramène à la controverse qui circule depuis le début du mois de janvier, concernant l’abolition de la catégorie des produits laitiers et substituts qui a suscité beaucoup d’inquiétude chez les producteurs de lait et chez les consommateurs. En fait, les produits laitiers ne sont pas écartés du guide, mais ils sont maintenant joints à la catégorie d’aliments protéinés.
Depuis les quelques ébauches d’un rapport sorties au début janvier et identifiant le manque de la catégorie du lait, et il n’en fallait pas moins pour remarquer que le guide avec l’arc-en-ciel de couleur tel que nous l’avions connu, ne serait vraisemblablement plus le même.
C’est la compagnie Earnscliffe Strategy Group, qui a été mandatée par Santé Canada afin de produire ce rapport préliminaire. Un rapport pour faire suite à la présentation de visuels du potentiel nouveau Guide alimentaire canadien à des groupes de Canadiens de différents milieux et différentes origines afin de prendre un choix plus éclairé sur le nouveau «look» du guide.
Le commentaire général qui ressortait déjà depuis la présentation de ces ébauches, c’est que ce nouveau guide pourrait bien créer une confusion chez les Canadiens quant à la réelle valeur nutritive du lait. En retirant la catégorie qui leur était propre, cela pourrait faire croire aux Canadiens de reconsidérer le lait comme un choix sain. Isabelle Neiderer, diététiste agréée et directrice de la nutrition et de la recherche des Producteurs laitiers du Canada (PLC) défend la place du lait : «Les données scientifiques récentes démontrent clairement que la consommation quotidienne de deux à quatre portions de produits laitiers a un rôle bénéfique à jouer dans la promotion de la santé des os et la prévention de plusieurs maladies chroniques que Santé Canada veut combattre avec le nouveau Guide alimentaire, notamment l’hypertension, le cancer colorectal, le diabète de type 2 et l’AVC.» Le président des Producteurs laitiers du Canada avait même ajouté à ce moment que : «Non seulement cela nuirait au secteur laitier et aux centaines de milliers de personnes qui en dépendent pour gagner leur vie, mais cela risquerait aussi de nuire aux consommateurs canadiens en créant de la confusion au sujet de la valeur nutritive des produits laitiers.» Il ne faut pas oublier que les producteurs de lait ont récemment eu la vie dure en réponse aux nouvelles ententes et accords commerciaux pris par le gouvernement.
Suite à la sortie officielle du guide, les PLC ont rappelé certains des bienfaits pour la santé que procurent les produits laitiers : «… les recherches continuent de confirmer que les protéines du lait figurent parmi les meilleures disponibles, mais les avantages nutritionnels des produits laitiers vont bien au-delà de cette teneur en protéines.» pouvait-on lire dans leur plus récent communiqué. Il faut se rappeler que dans le guide de 2007, il était recommandé de boire du lait écrémé ou du lait 1% ou 2% M.G et d’en boire deux tasses (500ml) par jour pour avoir assez de vitamine D et aucune mention de ce genre n’est faite dans le nouveau. Au Canada, selon les dernières données de Statistiques Canada en 2017, c’est plus de 221 000 emplois à temps plein qui sont soutenus grâce au secteur du lait canadien. Alors est-ce que l’abolition de la catégorie des produits laitiers à part dans le guide aura une influence sur la consommation du lait des habitants du pays? Ça reste à voir.
Ariane Lalande-Borris Dt.P. nutritionniste, souligne que le Canada s’est peut-être inspiré du nouveau Guide alimentaire du Brésil qui est sorti en novembre 2015. Point que Santé Canada n’a pas nié rappelant que le processus du nouveau guide a regardé plusieurs autres documents officiels de différents pays dans ses études. Le guide du Brésil ne recommande pas de portions et ne contient pas de groupes alimentaires. Il vise à donner le goût aux Brésiliens de se faire à manger, tout en étant axé sur la nutrition, la santé, la prévention des maladies et les aspects culturel et environnemental du peuple. «Le changement est bénéfique, déclare la diététicienne et nutritionniste madame Lalande-Borris, car les connaissances évoluent et les recommandations doivent s’adapter aux nouveaux défis des consommateurs.» Elle ajoute aussi que plusieurs points sont intéressants dans notre nouvelle édition du guide : «Privilégier des aliments frais et moins transformés, l’ouverture du nombre de portions versus l’écoute de notre corps avec les signaux de faim et de satiété et retrouver le plaisir de manger et de cuisiner à la maison seront des concepts plus présents et concrets pour les Canadiens.»
Le guide tel que nous le connaissons n’a pas toujours ressemblé à l’arc-en-ciel de quatre couleurs représentants les quatre groupes. Le guide arc-en-ciel apparu en 1992 avait en 1977 un soleil et quatre groupes colorés. Il est à noter que dans la version du guide de 1961 nous avions aussi à ce moment cinq groupes, puisque les fruits et les légumes étaient dans deux groupes distincts. Donc est-ce que de consolider deux groupes alimentaires pour une faire un groupe d’aliments protéinés en 2019 ne démontre pas un quelconque progrès dans la société des temps modernes?
Diététiste professionnelle, Karine Landry, du Nouveau-Brunswick reste tout de même optimiste et réaliste : «Le message de prévention véhiculé par le nouveau guide demeurera le même, mais le moyen d’y parvenir sera tout de même différent! Plutôt que de suggérer la consommation quotidienne d’un nombre défini de portions de chacun des quatre groupes d’aliments, le guide proposera plutôt de savourer quotidiennement une variété d’aliments sains comme les légumes, les fruits, les aliments à grains entiers et les aliments protéinés.»
Bref, nous sommes loin du temps du premier guide alimentaire qui se retrouvait sous le titre Règles alimentaire officielles au Canada présenté en 1942. Ce guide était surtout conçu dans le but de prévenir les carences nutritionnelles de la population et à améliorer sa santé, malgré le rationnement des vivres en temps de guerre. Un but qui n’a pas tant changé après toutes ces années puisque Santé Canada continu d’aider la population canadienne pour orienter ses choix vers de bons aliments et promouvoir une alimentation saine pour tous les Canadiens et les Canadiennes.
Pour plus d’informations sur le Guide alimentaire canadien, des vidéos, des recettes ou encore d’autres conseils vous pouvez vous rendre à l’adresse web suivante : Canada.ca/GuideAlimentaire.