Par Marc Dumont
L’intérêt et la demande pour l’orge à malter sont grandissants depuis quelques années. Afin de répondre à cette demande, la Northern Ontario Farmers Innovation Alliance (NOFIA), située dans le nord de la province, a mis sur pied un projet de recherche sur ce grain rempli de potentiel.
Ce projet de recherche en cours depuis 2018, en est maintenant à sa troisième et dernière année. La recherche veut pouvoir améliorer les rendements et la qualité de l’orge qui est produite dans le nord de l’Ontario.
« Il y a un vif intérêt des brasseurs du sud de l’Ontario pour de l’orge à malter récoltée dans le nord de la province : une bière totalement ontarienne serait un atout publicitaire important, » a expliqué Emily Potter, directrice générale de NOFIA.
À l’heure actuelle, l’Ontario importe chaque année 300 000 tonnes d’orge maltée en provenance de l’Ouest canadien. « C’est un marché à fort potentiel, » ajoute Emily. Selon l’Association des microbrasseries de l’Ontario, il y avait 200 microbrasseries en 2016. Leurs prévisions montrent qu’on pourrait en retrouver 500 d’ici 10 ans. L’engouement pour les bières artisanales ne s’estompe pas et la recherche des consommateurs pour des bières locales et de nouvelles microbrasseries le démontre bien aussi.
« Nous avons le même climat que dans l’Ouest, » dit Emily. « Et de là l’intérêt pour cette recherche. » Les retombées de la recherche visent le marché régional et permettraient d’ajouter potentiellement une nouvelle récolte pour les fermiers du Nord. « Il y a une différence de 20 % de revenus entre l’orge pour consommation animale et l’orge pour la bière, » précise-t-elle.
Le projet de recherche veut évaluer les variétés d’orge à malter dans le climat du Nord de l’Ontario et veut également identifier les meilleures pratiques dans différentes régions du nord. L’étude se fait en partenariat avec les Producteurs de grains de l’Ontario (Grain Farmers of Ontario) et le Partenariat canadien pour l’agriculture. Les essais sont effectués sur les stations de recherche de New Liskeard, Thunder Bay et Emo. Il y a également des essais sur des fermes.
L’objectif pour la production d’orge à malter est d’améliorer le rendement tout en conservant le niveau acceptable de protéines. Pour y arriver, les tests se font avec des intrants d’azote et de soufre. L’azote a un impact majeur sur les niveaux de protéines dans la récolte, tandis que le soufre compense la diminution de niveaux dans les sols en Ontario. Les deux intrants ont tendance à augmenter les rendements, mais cela a un effet négatif sur l’ensemble de la qualité de l’orge à malter. Voilà pourquoi il faut tester différents taux de ces éléments afin de déterminer le meilleur plan de gestion des intrants pour l’orge à malter dans le Nord ontarien.
L’orge à malter doit contenir de 11 à 12,5 % de protéines. Un niveau trop élevé ralentit la quantité d’eau absorbée durant l’absorption ce qui peut affecter la qualité finale du malt. Un niveau trop faible bloque les enzymes nécessaires pour modifier le grain d’orge et défaire l’amidon durant le brassage de la bière. La grosseur du grain est importante ; plus le grain est gros, plus il contient d’amidon ce qui produit plus de bière au poids du malt. Enfin, c’est le type d’orge qui a plus de 95 % de germination ce qui est acceptable pour le maltage.
Les tests sont effectués sur 10 variétés d’orges et après deux ans d’essais, ce sont les variétés Bently, AAC Synergy et Fraser qui sont les plus performantes. Dans l’ensemble, les résultats ne sont pas probants en raison des conditions climatiques difficiles des deux dernières années ; des printemps tardifs et humides et des automnes pluvieux hors de la normale faussent certains aspects des essais. Après chaque saison, des échantillons sont prélevés et expédiés à Canada Malt pour évaluer si l’orge est de qualité suffisante pour le maltage. Présentement, c’est dans la région de Thunder Bay qui obtient les meilleurs résultats.
Si les résultats sont concluants, il est même envisageable de construire une mini-usine pour le maltage. « Il y a assurément un intérêt et certaines études ont déjà été menées, mais aucun investisseur ne s’est encore pointé à l’horizon, » conclut la directrice générale de NOFIA, Emily Porter.